L’échelle d’inférence de Chris Argyris

Imaginez une échelle invisible, mais toujours présente dans votre esprit — une échelle qui relie la réalité brute de ce que vous observez à ce que vous faites. Cette échelle, c’est celle de l’inférence, l’un des modèles clés développés par le psychologue organisationnel Chris Argyris. Elle éclaire comment nous construisons nos raisonnements, souvent à l’insu de notre conscience, et comment nous enchaînons logiquement (ou non) sur des décisions et des actions.

Qu’est-ce que l’échelle d’inférence ?

Développée par Chris Argyris (et Donald Schön), ce modèle montre le processus mental en sept étapes – de l’observation à l’action – illustrant comment nos croyances et décisions émergent de ce que nous choisissons de voir et d’interpréter .

Les sept barreaux de l’échelle

(Se lit de bas en haut)

1. Observation / Données disponibles

Nous faisons face à une réalité brute — des faits, gestes, mots, rapports, comportements — tout ce qui peut être enregistré ou observé 

2. Sélection des données

Face à cette abondance, notre esprit filtre ce qui semble pertinent selon nos expériences, croyances ou état d’esprit. Ce choix est souvent inconscient  

3. Interprétations (Ajout de sens)

Les données sélectionnées sont traduites selon notre cadre mental, notre vécu, notre culture — elles prennent sens à travers notre subjectivité  

4. Assomptions / Suppositions

Ces interprétations nourrissent des suppositions que l’on formule sur la situation — suppositions souvent non conscientes  

5. Conclusions

À partir des suppositions, nous tirons des conclusions rapides sur ce que cela signifie ou implique — un mode de pensée accéléré, pas toujours raisonné  

6. Croyances

Les conclusions répétées se cristallisent en croyances — vues sur le monde plus durables, façonnées par nos conclusions antérieures  

7. Actions

Enfin, tout ce cheminement mental conduit à agir — et souvent selon des croyances pas toujours examinées   

Les boucles réflexives : pièges cognitifs et renforcement des biais

Ce modèle n’est pas linéaire. Deux boucles circulaires (“loops”) posent particulièrement problème :

• Biais de confirmation

Nos croyances influencent ce que nous choisissons d’observer et de retenir, renforçant ainsi ces mêmes croyances — un cercle vicieux .

• Boucle action → données

Nos actions modifient la réalité observable, qui nourrira alors la pensée future — un va‑et‑vient perpétuel entre penser et agir .

Pourquoi ce modèle est utile

• Prendre conscience de son propre raisonnement inconscient : comprendre d’où viennent nos réactions, croyances ou décisions.

• Améliorer la prise de décision individuelle ou collective, notamment en entreprise, politique, ou même dans la vie quotidienne.

• Stimuler l’esprit critique : au lieu de conclure trop vite, interroger chaque marche de l’échelle aide à éviter les raccourcis cognitifs. 

Conclusion et conseils pratiques

L’échelle d’inférence nous invite à reculer avant de sauter aux conclusions. Pour l’utiliser efficacement :

• Identifiez le niveau où vous êtes (observation, interprétation, conclusion…).

• Descendez mentalement l’échelle pour interroger : sur quelles données reposent mes conclusions ? Qu’ai-je ignoré ? Quelles alternatives d’interprétation ou d’action existent ? .

• Remontez ensuite avec conscience, en intégrant plus de recul dans votre raisonnement et votre action.

En somme, l’échelle d’inférence de Chris Argyris est un outil puissant pour mieux comprendre notre façon de penser et décider — et ainsi, agir avec plus de clarté, d’équité et d’efficacité.


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